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CANCER : Il détourne le microbiome et pille le glucose

Actualité publiée il y a 5 années 5 mois 2 semaines
Cancer Cell
La croissance du cancer dépend considérablement de sa capacité à voler l’énergie aux cellules saines.

Cette équipe de l’Université du Colorado nous décrit le processus utilisé par la leucémie pour détourner à son profit le métabolisme et se servir en sucre pour trouver l'énergie dont elle a besoin pour se développer. Des travaux présentés dans la revue Cancer Cell qui nous éclairent sur les mécanismes de croissance des tumeurs et contribuent à expliquer pourquoi de nombreux patients atteints de cancer développent la cachexie, une condition parfois mortelle.

 

Car le cancer a besoin d'énergie pour alimenter sa croissance incontrôlée. Une croissance qui consomme beaucoup d’énergie, sous forme de glucose. La tumeur consomme tellement de glucose que les zones de consommation extrême de glucose sont souvent les sites mêmes de la tumeur. Mais comment le cancer obtient-il ce glucose ? C’est ce que nous explique cette étude du centre de cancérologie du Colorado en prenant l’exemple de la leucémie : la leucémie réduit la capacité des cellules normales à consommer du glucose pour en obtenir plus pour nourrir sa propre croissance.

 

Les cellules leucémiques réduisent le taux de glucose pour les cellules normales explique le Dr Craig Jordan, chercheur au centre de cancérologie de l’Université du Colorado, chef du Département Hématologie et professeur d’hématologie, et auteur principal de l’étude. Ainsi, à l'instar du diabète, les stratégies de lutte contre le cancer dépendent de l'insuline. Car les cellules ont besoin d'insuline pour utiliser le glucose. Dans le cas du diabète, le glucose s'accumule dans le sang. L’étude montre que la leucémie induit une accumulation de glucose similaire de 2 manières :

  1. Les cellules tumorales transforment les cellules adipeuses en une protéine appelée IGFBP1. Cette protéine rend les cellules saines moins sensibles à l'insuline, qui signifie que lorsque les niveaux d’IGFB1 sont élevés, il faut plus d'insuline pour utiliser le glucose que lorsque les niveaux d’IGFB1 sont faibles. Ainsi, la consommation de glucose des cellules saines diminue.
  2. Une deuxième stratégie des cellules tumorales est de s’assurer que la production d’insuline n’augmente pas pour répondre aux besoins créés par l’augmentation de l’IGFBP1. Les cellules tumorales diminuent la production d'insuline, et en grande partie dans l'intestin.

 

 

Le rôle clé du microbiome intestinal : les chercheurs montrent en effet que certains des facteurs qui régulent le glucose sont produits par les intestins ou les bactéries du microbiote intestinal. Ils observent notamment que la composition du microbiome chez les animaux modèles leucémiques est bien différente des souris témoins. En particulier, le microbiote des souris leucémiques manque « cruellement » de bactéroïdes, de « bonnes bactéries » qui produisent des acides gras à chaîne courte qui à leur tour alimentent la santé des cellules qui tapissent l'intestin. Sans bactéroïdes, la santé intestinale souffre. L’étude montre ainsi que sans bactéroïdes, la santé intestinale souffre d'une manière qui aide spécifiquement le cancer à se développer.

 

La perte d'hormones incrétines : Lorsque la glycémie est élevée, par exemple après avoir mangé, l’intestin libère des incrétines qui abaissent la glycémie et la ramènent à la normale. En impactant l'intestin, la leucémie inactive ces incrétines, permettant à la glycémie de rester supérieure à ce qu'elle devrait.

 

La leucémie isole également l'activité de la sérotonine. La sérotonine est bien connue comme étant un produit chimique qui procure une sensation de bien-être et qui aide à réguler l’humeur et se retrouve dans de nombreux antidépresseurs. Mais la sérotonine est également essentielle à la fabrication de l'insuline dans le pancréas. En s'attaquant à la sérotonine, la leucémie réduit encore la production d'insuline.

 

Pourquoi les patients atteints de cancer développent une cachexie : on comprend mieux cette conséquence parfois mortelle des cancers, où les patients « se laissent dépérir » et perdent du poids. En cause donc, ces changements systémiques entraînant l'épuisement des réserves d'énergie normales.

 

Mais il est possible de « re-réguler » cette consommation d’énergie : en recalibrant le métabolisme du glucose chez les souris modèles de leucémie, grâce à des agents pharmacologiques, les scientifiques montrent qu’ils peuvent restaurer la régulation du glucose et ralentir dans le même temps la croissance des cellules leucémiques. De quels agents s’agit-il ? D’agents étonnamment peu technologiques : L'un est la sérotonine, l’autre la tributyrine, un acide gras présent dans le beurre et d'autres aliments. La supplémentation en sérotonine a remplacé la sérotonine non traitée par la leucémie et la tributyrine a contribué à remplacer les acides gras à chaîne courte absents en raison de la perte de bactéroïdes.

 

« Ser-Tri » (pour sérotonine-tributyrine), une nouvelle thérapie ? C'est en effet plus qu'une théorie. La thérapie Ser-Tri a permis de récupérer les niveaux d'insuline et de réduire l'IGFPB1. Et les souris leucémiques traitées avec la thérapie Ser-Tri ont vécu plus longtemps que leurs homologues témoins.

Ainsi, la croissance du cancer dépend considérablement de sa capacité à voler l’énergie aux cellules saines. Empêcher ce déséquilibre du système énergétique contribue à bloquer la croissance du cancer et protège les tissus sains.

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