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ADDICTIONS: 15 recos pour une régulation des drogues légale et éducative

Actualité publiée il y a 8 années 1 semaine 23 heures
FFA

Ces 15 recommandations pour un changement d’orientation de la politique des drogues en France, sont l’aboutissement des travaux d’une Commission large et diversifiée, indépendante de toute pression et de tout lien d’intérêt, présidée par le Professeur Didier Sicard, Président d’honneur du Comité National Consultatif d’Éthique. Prenant en compte les expériences passées et l’évolution des politiques drogues et des addictions dans le monde, les évolutions sociétales mais aussi les dernières données scientifiques, ce rapport d’orientation et de recommandations de la Commission d’audition, appelle la France à « changer de logiciel » et à passer à une stratégie d’action, dans les soins et la prévention pour toutes les addictions. Ainsi les salles de consommation à moindre risque ne sont pas oubliées, ni la place de la cigarette électronique dans l’arrêt du tabac.

Certains pays dans le monde, amorcent de véritables virages, mais la France s'en tient à la continuité d'une politique basée à la fois sur la prohibition totale des drogues illégales et la frilosité face aux drogues licites (tabac, alcool) malgré leurs graves conséquences sur la santé publique, précise le communiqué de la Fédération Française d'Addictologie (FFA). L'Audition Publique sur la réduction des risques et des dommages (RdRD) liés aux conduites addictives, organisée à son initiative a permis d'entendre une trentaine d'experts, dont près d'un quart au nom d'associations ou communautés d'usagers, sur les différentes questions scientifiques, préventives, thérapeutiques, sociales et politiques que soulèvent la RdRD. Le débat public et retransmis en direct sur le web a réuni 300 participants de toutes origines et professions.


Les soins et la prévention plutôt que la stigmatisation : C'est l'esprit de ce rapport qui appelle à développer la réduction des risques et des dommages (RdRD), c'est-à-dire prévenir et à diminuer les conséquences négatives, sanitaires et sociales, des conduites addictives, plutôt que de « lutter contre » des produits et des comportements et de ne donner comme perspectives aux personnes ayant un problème avec ces conduites que la stigmatisation et l'abstinence.

15 recommandations qui traduisent le consensus qui existe aujourd'hui entre usagers, professionnels et institutions chargées de l'action sociale et sanitaire en matière de drogues et d'addiction.

1. Le développement de la RdRD passe par la dépénalisation de l'usage et donc par la révision de la loi de 1970 qui est en conflit avec la loi de santé publique de 2016. La dépénalisation de l'usage doit s'accompagner d'une réflexion sur la régulation des marchés des produits licites et illicites et sur les mesures à mettre en œuvre.

2. Préparer et organiser un débat sociétal, en lien avec les collectivités territoriales, sur les enjeux des addictions et de la stratégie de RdRD.

3. Valoriser les expériences existantes des usagers des groupes d'auto-support et des associations d'entraide. Renforcer les capacités des associations d'usagers dans le champ des drogues licites ou illicites afin de pouvoir agir dans un cadre légal et d'avoir des moyens pour s'organiser et être des interlocuteurs des pouvoirs publics.

4. La perspective gradualiste suppose la mise en réseau d'acteurs aussi différents que la police, la justice, l'éducation, l'insertion sociale, la santé. Développer des compétences partagées sur les problématiques liées aux usages, sur la philosophie et les outils de la RdRD. Former notamment à la communication et au counseling les différents acteurs en présence.

5. Les professionnels du soin et de la santé (médecins généralistes et hospitaliers, pharmaciens, psychologues, infirmiers, sages-femmes, travailleurs sociaux, etc.) doivent intégrer la philosophie de la RdRD dans l'ensemble de leurs pratiques y compris au-delà du champ des addictions.

6. Rapprocher les CSAPA et CAARUD dans leurs cultures et leurs pratiques, et développer la confiance réciproque

7. Ouvrir des espaces de consommation à moindre risque au sein des lieux existants (CAARUD et CSAPA) et mettre en place un dispositif d'analyse des produits consommés après étude des besoins et en respect du cahier des charges national.

8. Développer des programmes et des actions de RdRD destinés à des publics peu pris en compte actuellement comme les jeunes, les femmes, des personnes privées de liberté, des migrants, des seniors...

9. Dans le domaine du tabagisme, la cigarette électronique est un outil complémentaire de la réduction des risques qui permet à une partie non négligeable de ses utilisateurs de réduire significativement les effets délétères de la combustion du tabac. Cet outil nécessite une nouvelle approche de développement, d'évaluation et de recherche.

10. Encourager la recherche académique à travers le développement d'études participatives fondée sur la reconnaissance de savoirs expérientiels des usagers.

11. Mise en place d'un organisme indépendant destiné à la gouvernance et au financement des recherches autant académiques que venant du terrain et des usagers sous une forme à élaborer, tenant compte de l'existant.

12. Rendre effectivement accessibles les approches et les outils de RdRD dans les lieux de privation de liberté (établissements pénitentiaires et psychiatriques).

13. Agir sur la prévention en tenant compte du pouvoir délétère des lobbyings au niveau français et européen en régulant l'accessibilité aux boissons alcoolisées, en encadrant la publicité et en évitant de laisser à l'industrie cigarettière une influence excessive sur la réglementation des produits de remplacement.

14. Mieux prendre en compte les familles dans les problématiques générales des usagers, y compris dans les dispositifs de RdRD.

15. Analyser et proposer des réponses à la problématique de l'épuisement professionnel dans les structures spécialisées.

Bref, il s'agit de parvenir à un consensus pour une politique axée sur le respect des droits fondamentaux des personnes, la collaboration avec les usagers et le soutien à leurs associations. Une politique qui abandonne la pénalisation des usagers et la prohibition pour ouvrir d'autres voies de régulation légales et éducatives et développer des interventions de prévention, de promotion de la santé, d'intervention précoce jusqu'aux soins et aux accompagnements sociaux des usagers les plus dépendants.

La FFA va interpeller les autorités publiques, les partis et responsables politiques pour qu'ils prennent en compte les enjeux et l'importance du consensus qui existe dans la société française d'aujourd'hui afin de sortir des affrontements stériles, des impasses ou des immobilismes actuels.

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