ADVERSITÉ : Elle façonne littéralement le cerveau de l’enfant

Cette équipe de neuroscientifique de Université de Californie – Irvine révèle comment, au niveau moléculaire, cellulaire et structurel, l'adversité infantile façonne le cerveau et le comportement. Cette étude de synthèse, publiée dans la revue Neuron, a des implications importantes pour l'intervention précoce et le développement et la mise en oeuvre de stratégies de prévention.
L'adversité infantile touche plus de la moitié des enfants dans le monde
et constitue un facteur de risque important de problèmes cognitifs et de santé mentale plus tard dans la vie. Cette revue de la littérature, approfondie et actualisée, jette un nouvel éclairage sur l’impact profond de ces expériences infantiles négatives sur le développement cérébral mais ouvre également de nouvelles pistes pour mieux les comprendre et mieux les gérer.
L’étude examine les mécanismes à l'origine des conséquences à long terme de l’adversité et du stress infantile élevé qui lui est associé. La première conclusion des auteurs est qu’en dépit des recherches publiées sur ces 70 dernières années, d'importantes questions restent sans réponse.
Une première question vient à l’esprit :
« Comment les adultes, que ce soient les parents ou les chercheurs, peuvent-ils pleinement comprendre
ce qui est perçu comme stressant par un nourrisson ou un enfant ? ». Ces questions conceptuelles et méthodologiques révèlent à quel point il est nécessaire de développer une feuille de route pour la recherche sur ce problème urgent de santé mentale mais aussi pour la pratique clinique.
De nombreuses questions fondamentales restent ainsi en suspens :
- Que perçoit le cerveau en développement comme stressant ?
- Quels aspects du stress influencent le plus significativement la maturation cérébrale ?
- Quels âges du développement sont les plus vulnérables à l'adversité ?
- Quels sont les médiateurs moléculaires des effets du stress sur le cerveau ?
- Comment des expériences stressantes passagères peuvent-elles aussi entraîner un dysfonctionnement durable ?
L’imprévisibilité de l’environnement « compte » aussi : ainsi, l’auteur principal, le Dr Tallie Z. Baram, professeur de pédiatrie et l’un des chercheurs les plus éminents au monde dans ce domaine, relève que :
- « l’imprévisibilité de l’environnement précoce d’un enfant pourrait être tout aussi importante que les formes d’adversité plus traditionnellement reconnues, telles que la maltraitance ou la négligence »…
- De la même manière, certains stimuli sensoriels imprévisibles provenant des personnes qui s'occupent des enfants, et de l'environnement, peuvent constituer des facteurs d’effets neurodéveloppementaux négatifs ;
- De même encore, des facteurs émergents, tels que les caractéristiques sociétales et anthropiques comme les inégalités et la pollution, sont de mieux en mieux reconnus comme des contributeurs possibles de stress élevé et « d’adversité » pour l’enfant.
Quels mécanismes sous-jacents ? Les connaissances sur ces mécanismes restent limitées, et sont issues principalement d’études précliniques menées sur des modèles animaux. Ces recherches ont révélé que :
- différents types de stress peuvent produire des résultats distincts,
- ces effets étant influencés par la nature et le moment du stress, ainsi que par les variations liées à l'espèce, à la source du stress et au sexe.
- Au niveau moléculaire, le stress précoce peut altérer considérablement l'expression des gènes neuronaux par le biais de mécanismes épigénétiques. Ces changements peuvent entraîner des modifications à long terme de la réponse du cerveau aux expériences futures. Les principaux médiateurs moléculaires des effets du stress précoce, sont également identifiés, dont notamment les glucocorticoïdes et les neuropeptides comme les hormones de libération de la corticotropine.
- Au niveau cellulaire, et des circuits neuronaux, le stress précoce peut perturber la maturation des réseaux cérébraux en interférant avec des processus développementaux cruciaux, notamment les oscillations neuronales et l'élagage synaptique ;
- En d’autres termes, ce stress lié à l’adversité peut reprogrammer le cerveau à de multiples niveaux, moléculaire, cellulaire, et jusqu’à des ensembles cellulaires comme des circuits neuronaux entiers.
Quelles implications ? Si cette revue souligne avant tout les limites des connaissances actuelles et la nécessité de mener d’autres recherches, ces connaissances ouvrent déjà de nouvelles perspectives pour des interventions ciblées. Ainsi, de nouveaux rôles sont envisagés pour ces molécules cibles, dans des circuits neuronaux spécifiques affectés par le stress précoce.
« En nous concentrant sur la façon dont le cerveau en développement traite et réagit à ces expériences négatives, nous pouvons développer des stratégies plus efficaces pour prévenir et atténuer leurs effets à long terme », concluent ces chercheurs qui travaillent, toujours, à réduire le fardeau sociétal de l’adversité au début de la vie.
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