e-CIGARETTE : Un outil de sevrage oui mais à condition de l’avoir décidé
En période de confinement, la e-cigarette peut constituer une option de substitution intéressante pour les fumeurs. La e-cigarette pourrait même faire office de passerelle durant cette période difficile vers l’arrêt du tabac. En effet, les fumeurs utilisent de plus en plus les cigarettes électroniques et pour de nombreuses raisons, dans certains contextes où la cigarette classique est interdite, mais aussi pour réduire leur consommation de tabac. De nombreuses études ont tenté d’évaluer l'association entre l'utilisation de l’e-cigarette, l’expérimentation du tabac chez les jeunes, mais aussi le sevrage tabagique chez les fumeurs. Cependant le recul reste limité.
En effet, ce n’est que récemment, en 2006-2007, que ce dispositif, qui reproduit la fumée et la sensation d’une cigarette, en distribuant ou non de la nicotine, a fait son apparition aux États-Unis et en Europe. Sa prévalence d’usage élevée soit environ 4% de l’ensemble des 18-75 ans -soit 3 millions de vapoteurs en France- repose sur la perception générale d’un dispositif en faveur du sevrage tabagique, avec un risque réduit de maladies par rapport au tabac (1). Mais qu’en est-il ? Son rapide succès a entraîné un certain nombre d’interrogations en Santé publique, dont le rapport bénéfice/risque de son usage, à plus ou moins long terme. Cependant, l’antériorité des données fait défaut.
Le rôle possible de la e-cigarette dans le sevrage tabagique
De la e-cigarette au tabagisme ? La première inquiétude concerne les jeunes : la e-cigarette pourrait-elle être une passerelle d’expérimentation du tabagisme ? Une étude française, Constances, a répondu en 2016 sur ce risque : elle conclut à l’absence de preuve concluante d’un effet passerelle de l’e-cigarette vers le tabagisme, en particulier chez les adolescents. Ses conclusions dressent plutôt une tendance positive : l’usage de la cigarette électronique reste très rare chez les non-fumeurs, suggérant que le dispositif est plutôt un recours alternatif chez les fumeurs de cigarettes classiques, dans l'objectif d'arrêter de fumer. Enfin, aucun usager exclusif de e-cigarette, participant à l'étude, n’est devenu fumeur de cigarettes un an plus tard (2).
Un outil de sevrage tabagique ? L'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) nous apporte de premières données en France : « en 2016, 41,2 % des vapoteurs étaient des ex-fumeurs alors qu’ils n’étaient que 23,1 % en 2014 » (1). La e-cigarette serait-elle donc bien un outil d’aide au sevrage tabagique ?
C’est du moins la position, toujours en France, du Haut Conseil de la Santé publique (HCSP) qui dans l’actualisation de son avis relatif aux bénéfices-risques de la cigarette électronique, conclut en 2016, que la cigarette électronique peut être considérée comme une aide pour arrêter ou réduire la consommation de tabac des fumeurs (3).
A l’international, de grandes méta-analyses internationales nous apportent également de précieuses données
La cigarette électronique contenant de la nicotine plus efficace pour le sevrage tabagique : on ne peut pas ne pas citer la dernière méta-analyse menée par les experts de la Cochrane Review, une revue de référence (4). Ses conclusions de 2016 sur les effets des cigarettes électroniques restent les mêmes que lors du précédent examen de 2014 : plutôt un rapport bénéfice-risque positif des e-cigarettes avec nicotine, dans le sevrage tabagique. L'examen notamment de 2 essais contrôlés randomisés conclut que la cigarette électronique contenant de la nicotine peut augmenter les chances d'arrêt du tabac, dans les 6 à 12 mois, par rapport au même dispositif, mais sans nicotine. Précisément, les participants utilisant une cigarette électronique avec nicotine s'avèrent 2 fois plus susceptibles de s'abstenir de fumer pendant au moins 6 mois. L’analyse confirme également l'absence d'effets secondaires graves.
Encore faut-il décider d’arrêter de fumer : une très large méta-analyse publiée dans le Lancet Respiratory Medicine (4) a, elle-aussi, évalué les chances d'arrêter de fumer chez les fumeurs utilisant des cigarettes électroniques par rapport aux fumeurs ne les utilisant pas. L’étude aboutit à un résultat inverse : les chances de cesser de fumer sont estimées réduites de 28% chez ceux qui utilisent des cigarettes électroniques. Cependant, cette étude ne prend pas en compte chez ses participants, le souhait réel d’arrêt du tabac.
Une autre méta-analyse menée chez des utilisateurs de cigarettes électroniques qui souhaitent arrêter sans soutien d’un professionnel de santé, montre que les utilisateurs de cigarette électronique sont plus susceptibles de déclarer une abstinence continue que ceux qui utilisent un substitut nicotinique classique. Cette différence persiste après ajustement pour toute une gamme de caractéristiques du fumeur telles que la dépendance à la nicotine.
Un équilibre entre réglementation et promotion, c’est la proposition de cette étude récente (7) qui conclut, qu’en Angleterre, les cigarettes électroniques pourraient aider chaque année plus de 50.000 fumeurs à arrêter de fumer. L’étude présentée dans la revue Addiction est intéressante car elle révèle un lien positif entre le nombre de personnes qui arrêtent de fumer et celles qui tentent d’arrêter en utilisant la cigarette électronique. Mais surtout, elle met en évidence la nécessité d’un équilibre entre la réglementation et la promotion de la cigarette électronique. Dans ce contexte règlementé, la e-cigarette semble donc bien jouer son rôle d’outil de sevrage tabagique.
Si ces quelques données semblent ainsi confirmer le rôle possible de la e-cigarette dans le sevrage tabagique, elles doivent être néanmoins prises avec prudence. La e-cigarette semble jouer ce rôle à condition « d’être réservée » aux fumeurs, aux seuls fumeurs qui ont décidé d’arrêter, et sous condition d'une délivrance adaptée et contrôlée.
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