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INCONTINENCE : Sa représentation sociale reste « gênante »

Actualité publiée il y a 6 mois 3 semaines 4 jours
Tabou
Une revue des études récentes de la littérature apporte une photographie actualisée de ses représentations sociales, révélant une marge considérable d'amélioration (Visuel Adobe Stock 400007631)

Alors que l’incontinence touche aujourd’hui, toutes classes d’âge confondues, près de 10 % de la population mondiale et 25 % des personnes âgées de plus de 85 ans vivant à domicile, elle constitue un fardeau majeur de santé publique. Plus récemment, les études se sont multipliées pour préciser les différents types, symptômes, facteurs de risque et options thérapeutiques de l’incontinence, mais rares sont les recherches qui ont regardé comment l’image sociale de la condition évolue, non seulement en population générale mais aussi chez ceux qui la gèrent en première ligne et à domicile, les aidants familiaux.

Une revue des études récentes de la littérature apporte une photographie actualisée de ses représentations sociales, révélant une marge considérable d'amélioration.

 

La représentation sociale d’une condition ou d’une maladie a toute son importance pour la qualité des soins qui seront apportés : les représentations sociales sont définies comme « une forme de connaissance, socialement élaborée et partagée, ayant une visée pratique et contribuant à la construction d'une réalité commune à un groupe social ». On comprend ainsi mieux l’influence d’une reconnaissance sociale bienveillante et objective pour toute pathologie, pour sa prise en charge par les médecins et les soignants. D’autant que cette représentation sociale est nécessaire à chaque individu, ou professionnel de santé, car elle lui permet, en pratique, de mieux appréhender un environnement donné et d'agir et d'apporter les soins de manière optimisée.

 

Explorer la représentation sociale de l’incontinence permet aussi d'obtenir, sur un sujet aussi sensible, de nouveaux éléments de compréhension. Et plusieurs études révèlent que cette information, primordiale pour la qualité des soins, n'est toujours pas spontanément évoquée par les personnes interrogées, grand-public, soignants ou aidants, car jugée trop gênante.

Pour une reconnaissance plus objective et plus clinique de l'incontinence

Parmi les études publiées sur le sujet, une étude qualitative, menée par une équipe française de l’AP-HP, a tenté de mieux cerner les représentations sociales de l'incontinence urinaire, des aidants de personnes âgées. L'étude révèle toute l’ampleur du « travail à faire » pour une reconnaissance plus objective et plus clinique de la condition. L’analyse révèle en effet que :

  • pour les soignants comme pour le public, l'incontinence urinaire reste un sujet incompris et dérangeant :

« jugée trop intime, gênante et honteuse, elle est même considérée comme sans importance par ceux qui ne sont pas concernés » ;

  • certains participants vont même jusqu'à se moquer des personnes incontinentes ;
  • l’incontinence est analysée comme une réelle difficulté pour les relations sociales, parfois même considérée comme source de conflits ;
  • l’incontinence est source de remise en question du rôle d'aidant : devrait-il se résumer ou se contraindre à gérer la condition ?
  • l’incontinence est, malheureusement aussi et parfois, le moyen « de prendre le dessus » sur le résident ou la personne aidée. Le choix et le change des protections deviendraient-ils ainsi, dans certains cas déplorables et extrêmes, une sorte de gratification accordée au patient ?

 

Précisément, les études nous apprennent que, à tort ou à raison,

 

  • l’incontinence reste un sujet mal compris ; de nombreuses fausses croyances subsistent et, à titre d’exemple, "qu'une personne souffrant d'incontinence urinaire est toujours dépendante !"
  • les aidants, concernés au quotidien, manquent d'infrmations; ils ont 2 fois plus questions sur l'incontinence urinaire que le grand-public ;
  • l’incontinence est une condition perturbatrice de la vie quotidienne : encore une fois, elle est largement associée à la dépendance, aux mauvaises odeurs, aux tâches ingrates (toilettes, changes), aux malaises et aux chutes, aux fuites et aux cystites ;
  • l’incontinence est associée à l’isolement, en raison de lourdes conséquences psychologiques, dont la peur de sortir, une réduction du temps passé avec les autres, une désocialisation liée aussi à une discrimination, une altération de l'image de soi ;
  • une difficulté dans les soins : de nombreux aidants expriment leur grande difficulté à prendre soin de leur proche incontinent urinaire, se jugeant alors « en dehors de leur rôle ». L’incontinence apparaît comme une limite dans les soins, une intrusion dans l’intime, un bouleversement des relations entre les générations mais aussi parfois, entre hommes et femmes ;
  • une source de conflits entre aidant et aidé mais aussi plus largement au sein des familles ;
  • un sujet toujours dérangeant et trop « tabou pour en parler ouvertement » avec l’aidant, la personne incontinente éprouvant un sentiment d'humiliation et de régression…

 

L’incontinence urinaire reste un catalyseur d'émotions négatives. Les aidants entretiennent ainsi un rapport très négatif avec le sujet, entre embarras, tristesse et colère. Même s'ils évoquent fréquemment les sentiments ressentis par leur proche incontinent urinaire, dont la honte, la gêne, la peur.

 

On l’aura compris, toutes ces représentations appellent à mener d’autres recherches pour mieux comprendre ces obstacles à une prise en charge plus adaptée, mieux personnalisée et bienveillante de l’incontinence, en particulier chez les personnes âgées, dépendantes ou démentes.

 

Une optimisation de la prise en charge, qui passe assurément par une éducation, une formation, bref une représentation plus simplement clinique de l'incontinence.