MICROBIOTE : Comment la galvanotaxie attire les bactéries
Cette bioélectricité intestinale, décrite pour la première fois par une équipe de gastroentérologues et de biologistes de l’University of California (UC) - Davis Health, permet aux mauvaises bactéries de provoquer des maladies : l’étude découvre et décrypte comment un courant électrique dans l'intestin attire des agents pathogènes comme la salmonelle et les aide à provoquer une infection. Ces travaux, publiés dans la revue Nature Microbiology, apportent une nouvelle lumière sur des maladies chroniques complexes, telles que les maladies inflammatoires chroniques de l'intestin (MICI).
Cette étude est également fondamentale pour les experts en maladies infectieuses et les biologistes qui étudient les bactéries. Les agents pathogènes nocifs, comme la salmonelle, se frayent un chemin dans un système intestinal complexe où ils sont largement dépassés en nombre par les bonnes bactéries et les cellules immunitaires. Cependant, chaque année, la salmonelle est responsable d’environ 1,35 million de maladies et de 420 décès aux seuls États-Unis. Pour infecter l’hôte, ce pathogène doit traverser la paroi intestinale.
Ces pathogènes doivent donc trouver des points d'entrée vulnérables dans l'intestin qui leur permettent d'envahir et d'infecter le corps. « Lorsqu’elles sont ingérées, les salmonelles parviennent jusqu’aux intestins. Là, elles sont largement dépassées en nombre par plus de 100.000 milliards de bactéries commensales, rappelle l’auteur principal, Yao-Hui Sun, chercheur affilié aux départements de médecine interne, d’ophtalmologie et de sciences de la vision et de dermatologie.
Un nouveau mécanisme bioélectrique qui permet aux bactéries de trouver la porte d’entrée
Pour comprendre comment les salmonelles parviennent à se frayer un chemin dans l’intestin, les chercheurs ont observé le mouvement des bactéries S. Typhimurium (une souche de Salmonella) et l’ont comparé à celui d’une souche inoffensive de bactéries Escherichia coli (E. coli).
Les auteurs rappellent que l’intestin est un organe très complexe. Sa structure épithéliale comprend des villosités et l'épithélium associé aux follicules lymphoïdes (EAF). L'épithélium des villosités est constitué de cellules absorbantes (entérocytes) avec des protubérances qui aident à l'absorption des nutriments. L'EAF contient des cellules M recouvrant de petits amas de tissu lymphatique appelés plaques de Peyer. Ces cellules M sont chargées de l'échantillonnage des antigènes. Elles agissent comme la première ligne de défense du système immunitaire contre les antigènes microbiens et alimentaires.
L’étude, menée sur la souris modèle d’infection à salmonelle, révèle que ces bactéries détectent des signaux électriques dans l'EAF. Elles se déplacent vers la source de ces signaux, une zone de l’intestin où elles trouvent des ouvertures par lesquelles elles peuvent entrer. Ce processus de mouvement cellulaire en réponse aux champs électriques est appelé
galvanotaxie, ou électrotaxie.
- E. coli et Salmonella réagissent différemment aux champs bioélectriques. Elles ont des réponses opposées au même signal électrique. Alors que E. coli se regroupe à côté des villosités, Salmonella se rassemble au niveau du EAF ;
- le champ bioélectrique dans l’épithélium intestinal est configuré de manière à ce que Salmonella en profite pour être orientée vers le EAF, ce qui n’est pas le cas d’E. coli.
De précédentes recherches avaient décrit un processus de chimiotaxie : avec la chimiotaxie, les bactéries détectent les gradients chimiques et se déplacent vers ou loin de composés spécifiques. Mais la nouvelle étude suggère que la galvanotaxie de Salmonella vers le EAF ne se produit pas par des voies de chimiotaxie.
L’étude décrit ainsi pour la première fois, un mécanisme alternatif ou complémentaire dans la modulation du ciblage de Salmonella vers l'épithélium intestinal.
Un nouvel éclairage sur les MICI : ce mécanisme a des implications possibles pour d'autres infections bactériennes ainsi que pour leur prévention et leur traitement : « il serait intéressant de savoir si les patients souffrant de MICI présentent également ces activités bioélectriques aberrantes dans l'épithélium intestinal ».
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