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POLLUTION : Faut-il estimer ses effets en années de vie perdues ou à gagner ?

Actualité publiée il y a 6 années 10 mois 2 semaines
Ecological Indicators
Pour les personnes exposées à long terme à des niveaux élevés la perte de vie pourrait atteindre une décennie

Tout est dans la méthodologie utilisée pour calculer ses indicateurs et suivre son évolution : la pollution atmosphérique accrue pourrait en fait réduire la durée de vie de ses victimes bien plus que prévu, révèle ce nouveau calcul d’une équipe de l'Université d'Aarhus au Danemark. Ces épidémiologistes nous expliquent, dans la revue Ecological Indicators, les principales différences de méthodologies utilisées pour estimer ces indicateurs en UE vs USA. Des données qui incitent à revoir les évaluations budgétaires liées à la politique climatique et les avantages économiques d’une réduction de la pollution atmosphérique. Car chez les personnes exposées à long terme à des niveaux élevés la perte de vie pourrait atteindre une décennie.

Estimer la mortalité liée à la pollution atmosphérique et comptabiliser le nombre de décès associés est devenu un indicateur environnemental à part entière, pourtant il existe de grands écarts de comptabilisation de part et d’autre de l’Atlantique. Cet article revisite les méthodologies de quantification de la mortalité liée à la pollution atmosphérique, utilisées par les organisations gouvernementales aux États-Unis et en Europe. En basant ces nouvelles estimations de réduction de durée de vie sur le ratio de risque de mortalité de l’OMS lié aux expositions à la pollution à long terme, les auteurs suggèrent une perte moyenne d'espérance de vie de 9 à 11 ans pour une augmentation annuelle de l'exposition à la pollution atmosphérique de 10 μg PM2.5 / m3. Cette nouvelle approche révèle finalement des différences considérables, de 1 à 3 entre les méthodologies européenne et américaine.

Cette nouvelle étude révèle ainsi un fardeau de santé lié à la pollution de l'air bien plus pesant qu’on ne le pensait, et la nécessité d’harmoniser les modèles de calcul en matière de survie et de coûts de santé de part et d’autre de l’Atlantique. L'auteur de l'étude, le Pr Mikael Skou Andersen, de l'Université d'Aarhus explique l’importance de disposer de données harmonisées et convaincantes qui encouragent les pays à réduire leur utilisation des combustibles fossiles. Car très complexe, le calcul des coûts associés aux décès prématurés liés à la pollution atmosphérique a donné lieu à des estimations très différentes, en raison des différentes méthodologies utilisées. La conséquence est donc la différence de « prix à payer » pour réduire les risques de décès prématurés, une différence qui peut jouer sur les décisions politiques.

Vies sauvées ou vies perdues ?

-Aux États-Unis, l'analyse bénéfices/coûts de la réduction de la pollution atmosphérique est calculé en fonction du nombre de vies sauvées, chaque vie étant actuellement estimée à 7,4 millions de dollars.

-En Europe, l'accent est mis sur l'évolution de l'espérance de vie : la plupart des décès liés à la pollution atmosphérique est concentrée sur les tranches d’âge 70- 80 ans, de sorte que le nombre d'années de vie perdues est estimée à 1 à 2, ce qui entraîne une sous-estimation des coûts.

 

La perte moyenne d'espérance de vie d’une victime à long terme est de 9 à 11 ans : Pour préciser ces estimations, les chercheurs se sont basés sur un tableau d’espérance de vie de 100.000 personnes, respectant une répartition par tranche d’âge représentative de la population actuelle, et donc des taux de mortalité estimés selon l'âge. L’équipe a pu ainsi déterminer pour chaque tranche d’âge, le nombre total d'années de vie normalement attendues. Puis l’équipe a appliqué l'effet de l'exposition à long terme à une pollution atmosphérique accrue de 10 μg de PM2.5 / m3 sur la mortalité. L’analyse révèle que :

-que l'âge moyen d'une victime de la pollution atmosphérique est de 78,9 ans,

-que sa perte moyenne d'espérance de vie est de 9 à 11 ans.

A titre de comparaison, la perte estimée d'années de vie pour les accidents de la circulation est de 35 à 40 ans.

 

Bref des données plus qu’essentielles pour les organisations internationales et les décideurs politiques qui souhaitent prévenir les décès causés par la pollution atmosphérique et investir pour réduire ses impacts sur la santé.