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ALZHEIMER : Tau bien plus prédictive que β-amyloïde ?

Actualité publiée il y a 4 années 3 mois 3 semaines
Science Translational Medicine
L’accumulation et les agrégats des 2 protéines Tau et β-amyloïde constituent une caractéristique de la maladie d’Alzheimer.

L’accumulation et les agrégats des 2 protéines Tau et β-amyloïde constituent une caractéristique de la maladie d’Alzheimer. Cependant les équipes de recherche restent partagées sur l’efficacité du ciblage de l’une ou l’autre de ces 2 protéines. Ces chercheurs de l’Université de Californie - San Francisco (UCSF) montrent ici que la protéine Tau surpasse de loin l'amyloïde pour effectuer un bilan précis des tissus cérébraux. Ils recommandent, avec ces travaux, présentés dans la revue Science Translational Medicine, une imagerie spécifiquement ciblée sur Tau (Tau-PET) et suggèrent que ce mode diagnostique marquerait le début de l'ère de la médecine de précision pour la maladie d'Alzheimer.

 

Les équipes de scientifiques qui travaillent sur l’Alzheimer ont longtemps débattu de l'importance relative des plaques amyloïdes et des enchevêtrements de Tau, 2 types d’agrégats de protéines mal repliées, observés dans les études post-mortem de cerveau de patients. Durant des décennies, le «camp amyloïde a dominé », conduisant à de nombreux candidats tentant de ralentir la progression de la maladie en ciblant l’amyloïde, avec des résultats décevants ou mitigés.

Des équipes plus nombreuses « se penchent » aujourd’hui sur la protéine Tau, autrefois considérée comme une simple balise marquant les cellules mourantes, et regardent si Tau pourrait être un moteur biologique de la maladie. Contrairement à l'amyloïde, qui s'accumule largement dans le cerveau, parfois même chez les personnes sans symptômes, les autopsies de patients atteints d'Alzheimer révèlent que Tau est concentrée précisément là où l'atrophie cérébrale est la plus marquée, et dans des zones qui permettent d’expliquer les différences de symptômes cognitifs entre les patients.

Cette nouvelle étude soutient la responsabilité majeure de Tau ainsi que l'idée qu’une imagerie cérébrale ciblée sur les enchevêtrements de protéines tau pathologiques permet de prédire de manière fiable la localisation d'une future atrophie cérébrale chez les patients atteints d'Alzheimer et cela un an ou plus à l'avance. Au contraire donc, des plaques amyloïdes, peu prédictives de la progression de la maladie.

Tau, la protéine la plus directement responsable de la dégénérescence cérébrale

Tau, un facteur majeur « conducteur » de la maladie : l’étude soutient le courant actuel des recherches, plus favorable à une responsabilité majeure et directe de Tau dans la dégénérescence cérébrale associée à la maladie d'Alzheimer et démontre, dans le même temps le potentiel du PETscan récemment développé pour détecter les enchevêtrements de Tau. En effet, ces travaux révèlent que la propagation de Tau est étroitement liée et de « manière frappante » à l’évolution cognitive dès l'année suivante, commente l’auteur principal, le Dr Gil Rabinovici, neurologue et responsable du programme d'imagerie PETscan au Centre de mémoire et du vieillissement de l’UCSF. « L'imagerie Tau-PET permet non seulement de prédire la quantité d'atrophie mais aussi le site du cerveau où elle va se produire. Ces prédictions sont bien plus puissantes que tout ce que nous avons pu obtenir à l’aide d’autres techniques d'imagerie, et ajoutent à la preuve que Tau est un facteur majeur « conducteur » de la maladie.

 

Une technologie d'imagerie cérébrale plus précise : les scientifiques ont développé une molécule injectable appelée flortaucipir - actuellement en cours d'examen par l’Agence américaine FDA - qui se lie à la protéine Tau mal repliée dans le cerveau et émet un signal radioactif doux qui peut être capté par l’imagerie. Ce PETscan d’un nouveau genre permet d’étudier la distribution des enchevêtrements Tau dans le cerveau.

Cette étude a testé si les niveaux de Tau détectés chez 32 patients atteints d'Alzheimer permettaient de prédire la future dégénérescence cérébrale. Les participants ont également passé des IRM pour mesurer l'intégrité structurelle de leur cerveau, à la fois au début de l'étude et à nouveau lors de visites de suivi, 1 et 2 ans plus tard. L’analyse montre que :

  • les niveaux globaux de Tau dans le cerveau au début de l'étude prédisent bien la sévérité de la dégénérescence telle qu’évaluée lors des visites ultérieures de suivi ;
  • les modèles locaux d'accumulation de Tau prédisent les sites d’atrophie avec une précision de 40% ;
  • en revanche, les scans de plaques amyloïdes ne prédisent correctement que 3% de la future dégénérescence cérébrale.
  • les participants les plus jeunes présentent des niveaux globaux de Tau plus élevés et l’imagerie révèle chez ces patients, un lien plus fort entre les enchevêtrements détectés et l'atrophie cérébrale ultérieure : cela suggère que d'autres facteurs, peut-être d'autres protéines anormales ou des lésions vasculaires pourraient également jouer un rôle dans la progression de la maladie d'Alzheimer.

 

En conclusion, la technique d’imagerie, qui permet de prédire les sites d'une future atrophie cérébrale chez les patients, va permettre non seulement d’accélérer les essais cliniques sur la maladie d'Alzheimer mais aussi d’apporter des soins mieux personnalisés aux patients. Les résultats confirment également l'espoir que les médicaments ciblant Tau, actuellement à l'étude, pourraient offrir des bénéfices cliniques aux patients en bloquant la neurodégénérescence. Enfin, l’outil Tau-PET va, pour la première fois, permettre aux médecins de donner aux patients une idée de ce à quoi ils peuvent s'attendre en révélant le processus biologique qui sous-tend leur maladie.

 

Personne ne doute que l'amyloïde joue un rôle dans la maladie d'Alzheimer, concluent les chercheurs, mais de plus en plus de données suggèrent que Tau est réellement à l'origine de la maladie. « Le Tau-PET peut devenir un outil de médecine de précision extrêmement précieux pour les futurs essais cliniques, mais aussi pour le suivi et le traitement personnalisés des patients vivants avec la maladie ».

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