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ANTIBIOTIQUES : La peur du sous-traitement, la menace du sur-traitement

Actualité publiée il y a 7 années 1 mois 2 jours
BMJ
Idéalement, il devrait y avoir des essais cliniques pour soutenir la durée de la thérapie

Le patient a peur d’arrêter son traitement, le médecin de prescrire sur une trop courte durée, et pourtant la menace vient d’une sur-utilisation des antibiotiques, souligne cet examen narratif de la littérature, motivé par la menace croissante de l’antibiorésistance. Des experts engagés qui émettent l’idée dans le BMJ qu’aller toujours jusqu’au bout des durées standards de traitement n’est pas obligatoirement favorable au rétablissement du patient et à la lutte contre les antibiorésistances.

La résistance aux antibiotiques peut se développer lorsque les bactéries sont exposées à plusieurs reprises aux antibiotiques. Les bactéries changent et s'adaptent alors, afin d’être capables de survivre lorsqu’à nouveau exposées à l'antibiotique. Les antibiotiques deviennent alors peu à peu inefficaces contre les infections qu'ils étaient auparavant capables d’éliminer. L’idée généralement admise est qu’un arrêt prématuré du traitement antibiotique ou sa mauvaise observance, favorise le développement de cette résistance des bactéries aux antibiotiques. Les patients sont donc censés terminer leur traitement antibiotique même s'ils se sentent mieux afin d’éliminer au mieux le risque de récidive de l'infection mais aussi le risque que de développement de ces bactéries antibiorésistantes.

 

Une totale remise en cause des principes établis : l’idée nouvelle qui émerge de leur examen remet totalement en cause ces principes établis en suggérant qu’arrêter le traitement antibiotique pourrait être tout aussi efficace pour le patient et qu’en cas de récupération avant la fin du traitement prescrit, aller jusqu’au bout de la prescription pourrait au contraire aggraver le risque d’antibiorésistance. Si les éléments de preuve sélectionnés par ces chercheurs de plusieurs instituts de recherche du Royaume-Uni, dont l'École de médecine de Brighton et Sussex, l'Université d'Oxford et de Southampton, l’ont peut-être été aussi pour soutenir leur point de vue, leur réflexion mérite d’être signalée, ne serait-ce que parce que des lignes directrices, quelles qu’elles soient ne sont pas inscrites dans le marbre.  

 

La peur du « sous- traitement » : La critique de ces experts est basée sur le fait que la recommandation d’observance du traitement jusqu’au bout de la durée prescrite est liée à la peur du « sous-traitement », c’est-à-dire d’une durée insuffisante pour éradiquer l’infection, que ce soit chez le médecin ou chez le patient. L’histoire des antibiotiques, utilisés pour la première fois dans les années 1940, à une époque de non prise de conscience de ce phénomène d’antibiorésistance, a contribué aussi à laisser de côté de cette notion de « sur-utilisation ».

 

L'examen de la littérature fait ressortir quelques points saillants :

-un nombre très limité d'études ayant porté sur la durée minimale de traitement nécessaire pour que les antibiotiques soient efficaces ;

-l’absence ou la faiblesse des preuves soutenant l'idée que des traitements plus courts entraîneraient obligatoirement un risque accru de résistance aux antibiotiques ou d'échec du traitement ;

-des preuves cependant, qu’un traitement plus court, dans certaines conditions, compromet le rétablissement ;

-la prescription d’une durée standard pour un traitement antibiotique peut nuire aux caractéristiques individuelles du patient, car chaque patient réagit différemment aux antibiotiques. Ainsi, les traitements précédents sont rarement pris en compte chez un même patient.

-Il est complexe voire impossible de tester les effets et l’efficacité d’un traitement « raccourci » -et en vertu de quelles données- en particulier parce que le principe de durées standards et de « finir son traitement » est profondément impliquée chez les médecins et les patients.

-Enfin, l’éducation des patients sur l’antibiorésistance reste insuffisante, il faudrait préciser que cette résistance ne peut être totalement évitée en terminant ses traitements…

 

 

« Idéalement, il devrait y avoir des essais cliniques pour soutenir la durée de la thérapie, mais dans l'intervalle, il appartient au prescripteur de recommander la durée du traitement », concluent les chercheurs. L’article souligne que l'éducation des patients, mais aussi des médecins est essentielle pour modifier les pratiques actuelles de prescription vers une utilisation plus mesurée des antibiotiques.  


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