MICROBIOTE INTESTINAL : Des bactéries génétiquement modifiées pour éduquer nos cellules
Cette équipe de l’Université Rockefeller explique comment certaines bactéries intestinales et les cellules humaines, des organismes biologiques évidemment très différents parlent pourtant le même langage chimique, basé sur des molécules appelées ligands. En se basant sur cette nouvelle compréhension, l’équipe propose de modifier génétiquement les bactéries pour produire des molécules ayant la capacité de traiter certains troubles en modifiant le métabolisme humain. La preuve de concept est ici rapportée, dans la revue Nature, sur la souris : l'introduction de bactéries intestinales modifiées permet une réduction de la glycémie et d'autres modifications métaboliques chez l’animal.
Ainsi, ces bactéries intestinales qui « parlent » aux cellules humaines ouvrent une nouvelle voie thérapeutique contre les troubles métaboliques : les chercheurs tirent parti de la relation symbiotique que nous avons avec les milliards de milliards de bactéries qui vivent dans notre corps en faisant à nouveau (e.g. probiotiques, prébiotiques ou transplantation fécale) l’hypothèse qu’une flore intestinale " conçue " sur mesure pourrait avoir des effets bénéfiques contre la maladie.
Verrouiller certains ligands néfastes et les remplacer par des ligands « thérapeutiques » : la nouvelle technique implique de « verrouiller » certains ligands qui se lient aux récepteurs sur les membranes des cellules humaines pour produire des effets biologiques spécifiques. Dans ce cas, les molécules dérivées de bactéries imitent les ligands humains et vont se lier à une classe de récepteurs connus sous le nom de GPCR, impliqués dans les maladies métaboliques. Précisément, ces bactéries intestinales génétiquement modifiées par les chercheurs produisent des ligands spécifiques, des N-acylamides, qui se lient avec un récepteur humain spécifique, GPR 119, connu pour être impliqué dans la régulation du glucose et de l'appétit. GPR 110 est déjà reconnu comme une cible thérapeutique dans le traitement du diabète et de l'obésité. Et ces ligands « bactériens » et « thérapeutiques » s’avèrent presque identiques structurellement aux ligands humains.
Des avantages de travailler avec les bactéries : les scientifiques expliquent que les gènes des bactéries sont plus faciles à manipuler que les gènes humains et sont beaucoup mieux connus. Et, bien qu'ils soient le produit de microorganismes non humains, ces ligands bactériens créés en laboratoire ne sont pas étrangers à l’hôte : « notre relation avec ces bactéries n'est pas antagoniste », expliquent les chercheurs, « ces bactéries font partie de notre physiologie. Ce que nous faisons, c'est exploiter le système natif et le manipuler à notre avantage ».
Une première étape donc et une preuve de concept, ici obtenue chez la souris, du potentiel thérapeutique de molécules dérivées des microbes, qui tirent parti de la chimie utilisée par la bactérie dans notre microbiote pour interagir avec nous.
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