PLASTICITÉ : Reprogrammer le cerveau pour lui donner plus de flexibilité
Il est possible de reprogrammer les cellules cérébrales pour favoriser une prise de décision plus flexible, démontre cette recherche expérimentale d’une équipe de neuroscientifiques de l’Université de Zurich. Les humains et les animaux ont la capacité de s'adapter constamment à de nouvelles situations mais il semble possible de modifier cette flexibilité : ces scientifiques de l'Institut de recherche sur le cerveau de l'Université de Zurich font la démonstration, chez la souris, que les neurones du cerveau qui contrôlent le comportement adaptatif peuvent être immobilisés. Une étude, présentée dans la revue Nature, qui améliore notre compréhension des processus de prise de décision et laisse entrevoir une voie thérapeutique pour les troubles neurologiques caractérisés par une déficience d’adaptabilité.
La pandémie COVID-19 illustre de façon spectaculaire à quel point il peut être vital pour les humains d’être capables de se débarrasser de certaines habitudes et de pouvoir s’adapter, en adoptant de nouveaux comportements. Les animaux ont cette même capacité à s'adapter rapidement aux changements des conditions environnementales. La plasticité du cerveau est à la base de cette capacité, rappelle l’auteur principal, Fritjof Helmchen, codirecteur du Brain Research Institute de l'Université de Zurich et directeur du Neuroscience Center Zurich. Cependant les processus biologiques qui permettent cette adaptabilité restent encore mal compris.
Le cortex orbitofrontal est capable de reprogrammer les neurones des zones sensorielles
L'équipe démontre que le cortex orbitofrontal, une région du cortex cérébral qui se trouve derrière les yeux, est capable de reprogrammer les neurones situés dans les zones sensorielles. Par expériences avec des souris, les chercheurs ont simulé un processus de réapprentissage dans des conditions contrôlées et ont regardé ce qui se passe dans le cerveau au niveau des neurones individuels au cours de ce processus.
La preuve de l’adaptabilité …chez la souris :
- les chercheurs ont d'abord entraîné les animaux à lécher chaque fois qu'ils touchaient une bande de papier de verre à gros grains avec leurs moustaches et ont récompensé la réponse avec un verre d'eau de saccharose ;
- cependant, les souris n'avaient pas le droit de se lécher lorsqu'elles brossaient leurs moustaches contre du papier de verre à grain fin; si elles le faisaient, elles étaient sanctionnées par un léger bruit irritant ;
- une fois les souris conditionnées, les règles ont été inversées : la récompense était accordée après contact avec du papier de verre à grain fin ;
- les souris ont été rapidement reconditionnées.
Un remappage des cellules : au cours de ces expériences, les chercheurs ont utilisé des techniques de biologie moléculaire et d'imagerie pour analyser la fonction des différents types de neurones au niveau individuel et dans les cortex cérébraux impliqués. Cette analyse révèle que :
- un groupe de cellules cérébrales dans le cortex orbitofrontal est particulièrement actif pendant le processus de réapprentissage : ces cellules possèdent de longs axones qui s'étendent dans la zone sensorielle chez la souris qui traite les stimuli tactiles. Alors que ces cellules avaient initialement suivi l'ancien schéma d'activité, certaines d'entre elles se sont vite adaptées à la nouvelle situation. Et lorsque ces neurones spécifiques du cortex orbitofrontal sont inactivés, le "réapprentissage" s’en trouve altéré et les neurones de la zone sensorielle ne présentent plus de modification de leur activité.
La plasticité de ces cellules et les instructions qu'elles reçoivent du cortex orbitofrontal d'ordre supérieur s’avèrent donc cruciales pour la flexibilité comportementale et notre capacité d'adaptation. On savait depuis longtemps que le cortex orbitofrontal était impliqué dans les processus décisionnels, cette recherche identifie précisément les circuits neuronaux sous-jacents.
Mieux comprendre et pour mieux traiter certains troubles neurologiques : ces processus fondamentaux observés chez la souris pourraient, selon les auteurs, se dérouler à l’identique dans le cerveau humain. «Cette connaissance approfondie des processus cérébraux complexes impliqués dans la prise de décision est importante et va contribuer à une meilleure compréhension des troubles cérébraux dans lesquels la flexibilité dans la prise de décision est altérée, comme dans l'autisme et de schizophrénie.
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