ADOLESCENCE : 2 parents sur 3 ont du mal à détecter la dépression chez leur enfant
Ce sondage de la Michigan Medicine pourra intéresser de nombreux pédiatres et rassurer de nombreux parents parfois démunis face aux changements d’humeur et aux « passages dépressifs » de leur adolescent. Les deux tiers des parents reconnaissent en effet leurs difficultés à détecter la dépression chez leurs enfants adolescents. Cependant, 1 parent sur 4 déclare que son enfant connaît un pair souffrant de dépression et 1 sur 10 que son enfant connaît un pair ayant commis une tentative de suicide. Au-delà de ces données frappantes, un expert de l’Université du Michigan, expert en prévention du suicide chez l’Enfant et l’Adolescent, apporte quelques recommandations utiles.
Selon ce sondage national du C.S. Mott Children's Hospital, mené auprès de 819 parents ayant au moins un enfant au collège, au collège ou au lycée, « ces hauts et ces bas » pourtant normaux dans l’humeur de l’adolescent constituent l'un des principaux défis auxquels les parents sont confrontés pour pouvoir identifier la dépression chez leurs enfants ou adolescents. De plus, dans de nombreuses familles, l'adolescence apporte des changements radicaux dans la dynamique de la relation entre entre les parents et les enfants, ce qui rend encore plus difficile pour les parents la « lecture de l'état émotionnel » des enfants et l’apparition de la dépression.
Un parent trop confiant peut ne pas percevoir les signaux subtils de la dépression
Le problème de la dépression et du suicide chez les jeunes ne doit pas être sous-estimé. En effet, les taux de suicide chez les jeunes continuent de grimper. Selon les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) les taux de suicide chez les 10 à 24 ans auraient augmenté de 56% entre 2007 et 2017 (aux Etats-Unis). L’étude confirme que la dépression n'est pas un concept abstrait ni pour les adolescents, ni pour leurs parents :
- si la majorité des parents se disent finalement plutôt confiants dans leur capacité à reconnaître la dépression chez leur enfant,
- seul un tiers des parents interrogés déclarent que rien ne les empêcherait de reconnaître les signes de dépression chez leur enfant ;
- les deux tiers reconnaissent une difficulté ou une incapacité à détecter des signes et des symptômes spécifiques ;
- 40% des parents ont du mal à faire la différence entre des sautes d'humeur normales et des signes de dépression ;
- 30% pensent que leur enfant est capable de cacher ses sentiments ;
- le sujet de la dépression est bien connu des lycéens et collégiens, confirme également ce sondage ;
- 1 parent sur 4 dit que son enfant connaît un camarade souffrant de dépression et 1 sur 10 dit que son enfant connaît un camarade qui a tenté de se suicider.
Ce bon niveau de sensibilisation à la dépression et au suicide chez les jeunes est cohérent avec les statistiques récentes montrant une augmentation spectaculaire du nombre de suicides chez les jeunes au cours de la dernière décennie. Et les parents interrogés sont bien moins confiants dans leur propre capacité à détecter ce risque chez leurs enfants, que leurs adolescents ne le sont pour le détecter en eux-mêmes. Les auteurs appellent donc les parents à rester vigilants pour détecter tout signe de dépression possible chez les enfants, à partir d’indices comme la tristesse, l'isolement, la colère, l'irritabilité et bien sûr le passage à l'acte. Une des mesures proposées est également d'identifier un adulte « de confiance », un grand-parent par exemple, qui peut être un soutien et un confident pour l’adolescent.
Enfin, la plupart des parents interrogés pensent que l’établissement scolaire et l’équipe de santé scolaire a son rôle à jouer dans l'identification de la dépression chez l’adolescent : 7 dépressions chez les adolescents commencent en effet au collège. Le problème est que peu d'établissements disposent des ressources suffisantes pour dépister leurs élèves pour la dépression…
Les conseils de l’expert : le Dr Cheryl King, expert reconnu en prévention du suicide chez les enfants et les adolescents, professeur de psychiatrie à l’Université du Michigan, délivre ces quelques conseils aux parents
- Identifier le risque de pensées suicidaires : il s’agit d’écouter et de surveiller plusieurs signaux d'alarme dont des signes de douleur ou de détresse émotionnelle sévère ou accablante. Les adolescents peuvent parler de désespoir, de suicide ou exprimer ces pensées suicidaires. Certains changements de comportement peuvent être inquiétants comme la cessation des relations avec les pairs ou des activités habituelles, ou encore l’expérimentation ou la consommation d’alcool ou d’autres substances. Plus de conflits interpersonnels, les signes d'agitation ou les troubles du sommeil peuvent également constituer les indices d’un profond mal-être.
- Parler avec ses enfants : avant d’aborder ces sujets avec leurs enfants, les parents doivent apprendre à gérer leurs propres émotions. De telles conversations doivent ainsi avoir lieu à un moment où les parents sentent qu'ils peuvent maintenir une attitude d'écoute, calme et attentive. Cependant, un principe de communication directe doit toujours être maintenu. Les parents ne doivent pas avoir peur de poser des questions à leur enfant, y compris sur d’éventuelles pensées suicidaires.
- Normaliser les expériences de l’Enfant : il s’agit de le rassurer, de lui expliquer qu’il n’y a pas de sujet ou de pensée tabous et qu’il n’y a aucune honte à ressentir certaines émotions.
- Rester à l’écoute de la détresse de son enfant : quels que soient les comportements et les propos tenus par l’enfant, les parents doivent réagir calmement, rester à l’écoute de ses contrariétés, « entendre la détresse ». Face à des parents « fermés », les enfants peuvent réagir avec colère.
- Adopter une approche collaborative et ne pas dicter La solution : les parents doivent se montrer « désolés » de la douleur ressentie et confiée par l’enfant et participer à leur réflexion sur les solutions possibles, sans pour autant les dicter ou les imposer.
- Que faire si votre enfant vous dit qu'il est suicidaire ? Les parents devraient alors faire savoir à leur enfant à quel point ils apprécient sa franchise et la confiance dont il leur fait preuve. Rester calme, s’assoir à côté de son enfant et écouter ses raisons, lui dire qu’on le comprend permet de réfléchir calmement aux étapes suivantes, comme une consultation avec un professionnel de la santé mentale. Cependant, les enfants qui expriment des pensées suicidaires déterminées ou qui planifient une tentative de suicide doivent faire l’objet d’une évaluation immédiate.
« Nous nous améliorons, mais la stigmatisation liée aux problèmes de santé mentale persiste et nous devons y travailler. Nous devons comprendre qu’aller voir un thérapeute ou un psychiatre est comparable à une visite chez médecin pour faire examiner une cheville cassée. Les obstacles à la recherche d'aide doivent être réduits, pour les adolescents en difficulté, mais pour leurs parents aussi ».
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