ANTIDÉPRESSEURS : Fonctionnent-ils mieux qu’un placebo ?
Quelques études ont remis en question l’efficacité réelle des antidépresseurs. Ensuite, tous les patients ne répondent pas aux antidépresseurs. Cette large étude réaffirme leur efficacité vs placebo. Ses conclusions, présentées dans le Lancet, ne signifient donc pas que tous les patients à symptômes dépressifs vont en bénéficier. Les antidépresseurs fonctionnent bien pour certains sujets, mais d'autres thérapies, non médicamenteuses, comme les thérapies cognitivo-comportementales peuvent être mieux adaptées à certains patients.
En substance, l’étude ne signifie pas non plus que les antidépresseurs sont très efficaces, mais qu’ils peuvent, chez certains patients, réduire significativement les symptômes dépressifs, et, en moyenne mieux qu’un placebo. Les chercheurs qualifient d’ailleurs leurs effets de « principalement modestes ». Les chercheurs comparent ici également les effets des différents médicaments à la fois en termes d'efficacité et de tolérance. Cette comparaison aboutit à 5 médicaments qui semblent plus efficaces et mieux tolérés, qui pourraient donc être prescrits en première intention.
Cette équipe internationale (Université d'Oxford et de Bristol, Université de Berne, Université Paris Descartes, Universität München et Université de Stanford) a mené une revue systématique et une méta-analyse des essais contrôlés randomisés en double aveugle évaluant les antidépresseurs pour les adultes souffrant de dépression et publiés jusqu’en janvier 2016. Les chercheurs se sont concentrés sur les antidépresseurs de « deuxième génération », dont la fluoxétine (Prozac®). En plus des recherches habituelles dans les bases de données, les chercheurs ont recherché des données non publiées, par exemple sur les sites web de sociétés pharmaceutiques. Ils ont pris en compte les données après 8 semaines de traitement antidépresseur ou par placebo, pour 2 résultats principaux :
- L’efficacité définie par le taux de patients ayant bénéficié d’une réduction de 50% ou plus des symptômes dépressifs,
- L’acceptabilité définie comme le nombre de patients n’ayant pas cessé de prendre le traitement.
Les chercheurs ont ensuite calculé l'efficacité relative et l'acceptabilité de chaque médicament par rapport au placebo, et chaque médicament par rapport aux autres.
Les chercheurs ont trouvé 522 études, dont 101 non publiées, couvrant 116.477 patients au total. 78% des études avaient été financées par des laboratoires pharmaceutiques. L’analyse montre que :
Les 21 antidépresseurs étudiés sont plus efficaces, en moyenne, qu’un placebo ;
- cette efficacité varie selon les antidépresseurs ;
- l'amitriptyline, un antidépresseur tricyclique plus ancien s’avère plus de 2 fois plus efficace que le placebo ;
- la réboxétine (recapture sélective de la noradrénaline) s’avère plus efficace de 37% vs placebo ;
- pour la plupart des antidépresseurs, les patients tout aussi susceptibles d'arrêter de prendre l'antidépresseur que le placebo ;
- un taux de patients plus élevé a cessé de prendre la clomipramine (un autre tricyclique) vs placebo
- un taux inférieur a cessé de prendre l'agomélatine (un antidépresseur « atypique ») ou la fluoxétine (un inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine) ;
- les comparaisons entre les médicaments désignent 5 antidépresseurs comme plus efficaces et mieux suivis que les autres antidépresseurs. Il s’agit de :
- escitalopram (ISRS)
- paroxétine (ISRS)
- sertraline (ISRS)
- agomélatine (atypique)
- mirtazapine (atypique)
- La comparaison révèle que ces médicaments sont généralement moins efficaces et moins bien tolérés :
- réboxétine (atypique)
- trazodone (similaire à un tricyclique)
- fluvoxamine (ISRS)
Cette méta-analyse livre ainsi, aux cliniciens, l’ensemble de données le plus complet permettant de guider la prescription pour traiter la dépression majeure chez l'adulte. Les auteurs précisent que l’efficacité et la tolérabilité comparée des différents anti-dépresseurs doit être pondérée en tenant compte du patient, de son histoire et de ses symptômes. Ils concluent en espérant que « ces résultats contribueront à la prise de décision partagée entre les patients, les soignants et leurs cliniciens ».
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