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COVID-19 et ALLAITEMENT : Pourquoi même traitée, la mère devrait allaiter

Actualité publiée il y a 4 années 4 mois 2 semaines
Breastfeeding Medicine
Faut-il que les jeunes mères COVID-19 traitées cessent d’allaiter ? (Visuel Fotolia)

On sait que le lait maternel apporte au nourrisson une précieuse couverture immune, mais qu’en est-il chez les mères atteintes de COVID-19 ?  La question se pose d’autant que les femmes enceintes et allaitantes ont été exclues des essais cliniques de médicaments pour traiter COVID-19. Cet article d’un expert de l’Academy of Breastfeeding Medicine, présenté dans la revue Breastfeeding Medicine, apporte de nouvelles données, en particulier sur le risque de passage du médicament dans le lait maternel puis chez le nourrisson. L’auteur appelle à repenser l’inclusion des femmes enceintes et allaitantes dans certains essais cliniques.

 

L'absence de données précises a compliqué, durant l’épidémie, les décisions thérapeutiques chez ce groupe de patientes : faut-il en effet donner aux femmes qui allaitent un médicament qui pourrait avoir des effets secondaires chez le nourrisson ? Faut-il que les jeunes mères COVID-19 traitées cessent d’allaiter ? L’auteur principal, le Dr Alison Stuebe, de l’Université de Caroline du Nord répond à son tour à la question.

Quel risque que le médicament atteigne et soit dangereux pour l'enfant ?

L’exemple du remdesivir : avant d’être autorisé par l’Agence américaine FDA pour le traitement de COVID-19, le remdesivir était disponible à des fins compassionnelles pour les femmes enceintes et les enfants de moins de 18 ans. Cependant, il était interdit aux femmes recevant un traitement à des fins compassionnelles d'allaiter, ce qui pose un dilemme pour les femmes qui accouchent avec une maladie COVID-19 critique.

Les mères qui allaitent ont également été exclues des essais cliniques sur le remdesivir. Il n’existe ainsi aucune donnée précise sur la présence du médicament dans le lait ou sur les résultats chez les nourrissons allaités par des mères traitées.

 

Peu de risque que le remdesivir atteigne le nourrisson : le remdesivir, administré par voie intraveineuse est une petite molécule qui peut être transférée dans le lait, mais pour affecter la santé du nourrisson, elle devrait être absorbée par le tractus gastro-intestinal sous sa forme active. Selon les experts pharmacologues, la molécule serait instable dans l'estomac et facilement décomposée avant l'absorption orale, c’est pourquoi, justement, elle est administrée par voie intraveineuse. Il est donc très peu probable que le médicament actif atteigne la circulation du nourrisson.

Bien que de nombreux médicaments soient présents dans le lait maternel, les niveaux sont généralement très faibles avec peu de risques pour l'enfant qui allaite de consommer même une fraction de la dose thérapeutique. De plus, comme on l’a vu, pour qu'un médicament présent dans le lait affecte l'enfant, il doit survivre au passage dans le système digestif et être absorbé par voie orale sous sa forme active.

« Pour la mère COVID-19, la suspension de l'allaitement pour commencer le traitement peut être la décision la plus risquée pour son bébé ».

La mère devrait poursuivre l’allaitement : La FDA indique ainsi, « les avantages sur le plan du développement et de la santé de l'allaitement maternel doivent être pris en compte ainsi que le besoin clinique de la mère de remdesivir ».

Par ailleurs, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et les Centers for Disease Control and Prévention américains (CDC) recommandent que les nourrissons de mères positives pour COVID-19 reçoivent du lait maternel. Enfin, des études ont montré qu’une mère avec COVID-19 qui arrête l'allaitement pour éviter le risque théorique d'exposer son nourrisson au remdesivir peut tripler le risque d'hospitalisation de son enfant si celui-ci contracte le virus.

La suspension de l'allaitement maternel chez les mères infectées par COVID-19 pourrait ainsi être préjudiciable car le nourrisson manquerait des nutriments essentiels du lait maternel. De plus, les anticorps acquis de la mère peuvent protéger l'enfant contre l'acquisition de COVID-19. Rappelons ici la position du Dr Marc PILLIOT, pédiatre et ex-Président de la CoFAM (Coordination Française pour l’Allaitement Maternel) « Si la mère est malade, il est fortement recommandé qu’elle continue d’allaiter son bébé en augmentant la fréquence des tétées (…) le lait maternel apporte une couverture immune parfaitement adaptée à l’environnement microbien et viral de la mère. Par le biais du cycle entéro-mammaire, dès le début de l’infection et donc avant même d’avoir des signes cliniques, la mère sécrète dans son lait des IgA sécrétoires, immunoglobulines spécifiques contre l’infection invasive. Par ailleurs, de très nombreux autres composants, y compris des cellules, vont permettre de créer un véritable bouclier immunitaire ».

 

 

Les femmes enceintes et allaitantes méritent un traitement fondé sur des preuves : cette situation complexe (COVID-19 + grossesse ou allaitement) repose enfin la question de l’inclusion de femmes enceintes et allaitantes dans certains essais cliniques. Pendant des décennies, l'absence de recherche chez les femmes enceintes et allaitantes a entrainé une pénurie d'informations pour prendre des décisions thérapeutiques pour les mères enceintes et allaitantes. En pratique, trop souvent, les cliniciens choisissent de ne pas traiter les maladies maternelles telles que la dépression et l'anxiété pendant la grossesse, ou conseillent aux femmes traitées « de se sevrer » sans tenir compte des risques du sevrage iatrogène pour la santé et le bien-être de la mère et de l'enfant.L’auteur principal prend ici position :

« Plutôt que d'exclure les femmes enceintes et allaitantes de la recherche, nous devrions les protéger par la recherche ».

 


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