IMMUNOTHÉRAPIES : Quelle place de la médecine de précision dans une vision écologique ?

La promesse de traiter en renforçant les défenses naturelles du patient est séduisante. A fortiori lorsque la thérapie promet chez certains patients des résultats durables, un critère particulièrement critique de la qualité des soins contre le cancer. Cependant, l’immunothérapie qui vise à façonner le système immunitaire de manière à le rendre capable de se défendre, seul ou presque, contre la tumeur, se révèle coûteuse et réservée à un petit nombre de patients. Elle pose la question de la place à accorder à une médecine de précision, dans une vision écologique de la santé.
L'immunothérapie anticancéreuse est devenue un outil incontournable de l'oncologie moderne : elle exploite la capacité du système immunitaire à reconnaître les cellules cancéreuses, via les molécules exprimées de manière unique dans ces cellules, comme des antigènes ou des mutations spécifiques à la tumeur. Alors qu'elle utilise des composants du système immunitaire du patient pour cibler ainsi sélectivement les cellules cancéreuses, elle permet de réduire considérablement les effets secondaires généralement associés aux traitements standards. Ces avantages en font déjà une médecine plus responsable. L’immunothérapie du cancer est aujourd’hui reconnue comme une option de traitement efficace du cancer en raison de sa sélectivité, de sa tolérance et de ses effets durables.
Si l'immunothérapie a révolutionné le traitement des cancers, est-elle efficiente et accessible ?
Bien que les premiers résultats des immunothérapies soient en faveur de réponses durables chez certains patients, la thérapie reste coûteuse et l’exploitation de biomarqueurs pour stratifier les patients en est encore à ses balbutiements. Si certains agents d’immunothérapie notamment les « inhibiteurs de checkpoint » ont permis d’obtenir des résultats impressionnants en termes de survie et de tolérance chez les patients cancéreux, des économistes de la santé mettent à l’index leur coût élevé, un rapport coût-efficacité et des gains en quality-adjusted life year (QALY) mitigés. Les modalités de remboursement restent « précaires » et ne permettent pas de garantir leur accès à tous les patients cancéreux.
Quel rapport coût-efficacité ? Quelques études ont tenté de l'apprécier pour certains agents d’immunothérapie et aboutissent à des coûts supérieurs à 100.000 euros par année de vie ajustée sur la qualité ou "QALY". Ces estimations suggèrent que pour être rentable, le traitement devrait permettre un bénéfice de survie d’au moins 12 mois par rapport à un placebo. Les preuves s’accumulent sur les coûts élevés de ces nouveaux anticancéreux par rapport aux avantages patients, à grande échelle. Leur utilisation généralisée pourrait être problématique. Certains experts alertent sur une mise en péril de la viabilité des systèmes de santé.
Compte-tenu du vieillissement des populations et des défis environnementaux en matière de soins de santé, un effort d’évaluation du rapport bénéfice-risque de l'immunothérapie est impérative, en particulier alors qu'elle est envisagée pour traiter un spectre toujours plus large de cancers chez un nombre toujours plus élevé de patients.
De nombreuses équipes appellent aujourd’hui à mieux caractériser ses avantages, à la fois pour améliorer la conception des essais cliniques mais aussi pour optimiser les critères d’éligibilité, l’accessibilité au traitement et la couverture des dépenses de santé des patients éligibles.
L’immunothérapie pose, comme toute thérapie personnalisée, la question de l'investissement dans une médecine de précision réservée par définition à un groupe très restreint de patients.
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