ÉVOLUTION : Pourquoi elle joue contre la vie éternelle
Nous n'avons pas évolué pour vivre éternellement, conclut cette équipe de l'Institut de biologie moléculaire (IMB) de Mayence (Allemagne) qui éclaire le mystère de l’origine du processus de vieillissement. Au cœur de ces travaux, l’autophagie, un des processus clés de la survie cellulaire, considéré comme favorable non seulement à la santé mais aussi à la longévité. Et si la sélection naturelle favorise les gènes qui œuvrent au succès de la reproduction, elle ignore parfois leurs effets négatifs sur la longévité. C’est le cas d’une série de gènes pléiotropes (c’est-à-dire qui jouent différents rôles) impliqués dans la régulation de l'autophagie, qui favorisent d’abord la jeunesse cellulaire mais une fois la reproduction accomplie, accélèrent le processus de vieillissement. Des travaux passionnants, présentés dans la revue Genes an Development.
L’autophagie est un processus catabolique (de dégradation des composés moléculaires absorbés par l'organisme) et omniprésent généralement associé à des effets positifs sur la santé et la longévité. L'inactivation de l'autophagie a jusque-là été documentée comme liée à des effets néfastes sur les cellules et les organismes.
Comme Darwin l'a expliqué, la sélection naturelle favorise les individus les mieux capables de s’adapter à un environnement donné, à s’y reproduire et à transmettre leurs gènes à la génération suivante. En bref, la probabilité de sélection d’un trait ou gène repose sur sa nature à promouvoir la reproduction. En théorie, ce principe devrait favoriser les individus porteurs de traits anti-âge ou pro-longévité, car leurs gènes pourraient être transmis presque à l’infini. Sur la base de cette hypothèse, le vieillissement ne devrait jamais avoir eu lieu.
L’hypothèse de la pléiotropie antagoniste (pléiotropie : un gène détermine plusieurs caractères phénotypiques) (George C. Williams- 1957) soutient que la sélection naturelle favorise les gènes pro-reproduction, mais ignore les effets négatifs de ces mêmes gènes sur la longévité. Ainsi, une même mutation génétique favorise l’abondance de progéniture, mais raccourcit la vie. Comme la progéniture porteuse de ces gènes est plus abondante dans un laps de temps plus court, ces gènes pro-reproduction mais aussi pro-vieillissement « deviennent figés dans notre ADN ». Bref, la théorie propose une explication d’un processus évolutif finalement pro-vieillissement.
Les effets pro-vieillissement ne font que commencer après la reproduction. C’est la théorie de ces chercheurs, dont le biologiste Jonathan Byrne, auteur principal de l’étude, qui reprennent la précédente mais en conférant au vieillissement, une fonction de contrôle évolutif. Et l’équipe va plus loin, elle identifie ici, en effet, un nombre étonnamment important de gènes qui semblent fonctionner de manière antagoniste, pro-reproduction, mais aussi, et ensuite, pro-vieillissement. Ces 30 gènes coïncident d’ailleurs avec certains des gènes de vieillissement identifiés chez le ver. Mais alors que l’équipe n’a testé que 0,05% des gènes du ver, ces gènes antagonistes pourraient être encore plus nombreux.
L’autophagie, à la fois source de jouvence puis de vieillissement ? Un sous-ensemble de gènes antagonistes semble ici conduire le processus de vieillissement selon ce décryptage mené sur le ver C. elegans. Et avec des « résultats fascinants », commente le Dr Holger Richly, co-auteur de l'étude. « Nous avons trouvé une série de gènes impliqués dans la régulation de l'autophagie, qui accélère le processus de vieillissement ». Surprise ! Car le processus d'autophagie est un processus de recyclage cellulaire favorable à la longévité. Mais il se trouve ici que ce groupe de gènes favorise le vieillissement : l'arrêt de ces gènes clés permet en effet aux vers de vivre plus longtemps. Ainsi, alors que l'autophagie est presque toujours considérée comme bénéfique, elle semble, après la reproduction, provoquer un dysfonctionnement qui induit le vieillissement.
Le cerveau et ses neurones, centre de jouvence et de vieillissement ? En inactivant l'autophagie dans les neurones de « vieux » vers, les chercheurs parviennent non seulement à prolonger la vie des vers, mais aussi à améliorer considérablement leur santé. « Nous allumons l'autophagie uniquement dans le cerveau et tout le sujet « revit ». Chez le ver ? Le résultat est une durée de vie augmentée de 50% !
La découverte pourrait avoir des implications considérables, évidemment dans le traitement des nombreuses maladies neuronales associées à une autophagie dysfonctionnelle (Alzheimer, Parkinson, Huntington), mais plus largement pour favoriser la longévité en stoppant, au bon moment, l'autophagie.
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