PARACÉTAMOL : Chez le nourrisson, il accroit la vulnérabilité des poumons
En France, l’utilisation du paracétamol a augmenté de 50% en 10 ans et son agent actif, l'acétaminophène reste l'analgésique le plus consommé. L'utilisation du paracétamol durant la grossesse et chez le nourrisson est déjà documentée comme liée à tout un éventail de risques, cette étude met en garde contre un nouveau risque en cas d’exposition chez le nourrisson : un risque accru d'asthme et de troubles respiratoires à l’adolescence. Cette étude de l’Université de Melbourne (Australie), présentée lors du Congrès 2018 de European Respiratory Society décrypte le processus responsable et identifie des variantes spécifiques des gènes GST qui renforcent la sensibilité aux problèmes pulmonaires.
Ainsi, les enfants qui prennent du paracétamol au cours des 2 premières années de vie et porteurs de certains variants pourraient risquer davantage de souffrir d’asthme avant l’âge de 18 ans. Cependant, les chercheurs démontrent ici une association -et non une relation de cause à effet- entre l'utilisation du paracétamol et l’apparition de l'asthme à l’adolescence, en particulier chez les sujets porteurs d’une variante particulière du gène de la glutathion S-transférase (GSTP1).
L’étude est menée auprès de 620 enfants suivis de la naissance jusqu’à 18 ans dans le cadre de la cohorte Melbourne Atopy. Ces enfants recrutés avant leur naissance car considérés comme présentant un risque élevé de développer une maladie allergique, en raison d’antécédents familiaux, ont été évalués toutes les 4 semaines après la naissance pendant les 15 premiers mois de vie, puis à 18 mois et à 2 ans pour la prise de paracétamol. A l’âge de 18 ans, les chercheurs ont analysé un échantillon de sang ou de salive pour les variantes des gènes GST : GSTT1, GSTM1 et GSTP1 et pour le diagnostic éventuel d’asthme via un test de spirométrie. Cette analyse montre que :
- la consommation de paracétamol à l’enfance chez les sujets porteurs d’une variante du gène GSTP1, GSTP1 Ile / Ile est associée à un risque accru de 80% développer l'asthme.
- en revanche, une exposition accrue au paracétamol chez les enfants ayant d'autres types de variantes de GST n’impacte pas le risque d'asthme.
- d’autres effets sont identifiés chez les enfants qui présentent une variante de GSTM1 dont une partie ne fonctionne pas. Chez ces enfants, l'utilisation de paracétamol s’avère associée à une réduction faible mais significative de la quantité d'air expirée, donc à une modification de la fonction pulmonaire. Mais les chercheurs ne savent dire si cette modification est cliniquement importante.
Une explication possible : les gènes GST contiennent les instructions pour fabriquer des enzymes qui utilisent un antioxydant appelé glutathion qui « épongent » les effets de l'exposition aux toxines dans le corps et les poumons. Ce mécanisme contribue à prévenir les dommages aux cellules et à l'inflammation. Or le paracétamol consomme du glutathion et ce faisant réduit la capacité de l'organisme à gérer l'exposition aux substances toxiques, expliquée l’auteur principal, Mme Dai, infirmière à l’Unité de santé allergique et pulmonaire de l’Université de Melbourne.
L’étude présente ainsi des preuves très préliminaires d’un effet néfaste du paracétamol chez le nourrisson sur la santé respiratoire en cas de profils génétiques particuliers. Mais attention, l'association pourrait être liée à des facteurs de confusion, notamment des infections des voies respiratoires inférieures causées par des virus chez les nourrissons, et traités par le paracétamol …Des recherches supplémentaires sont donc nécessaires pour confirmer ces conclusions.
N.B. Nestlé a soutenu cette étude
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